Initiation au pavage – partie 2

Dans le premier article de cette série, je vous ai expliqué ce qu’était un pavage et comment on le réalise, jusqu’à vous montrer qu’un motif de base peut se reconnaître aussi dans les assemblages plus conséquents et les artistes des zelliges usent de cette particularité.

Ceci est la suite de l’article Initiation au pavage – partie 1

Je vous ai aussi dit que j’utilisais trois formes de base mais je ne vous ai parlé que de deux formes : le carré et l’octogone, la troisième est l’étoile à huit branches qu’on nomme aussi soleil ou sceau dans les pays musulmans. Certains diront « sceau de Salomon » mais je ne pense pas qu’il faille utiliser ce terme complet car le sceau de Salomon est l’intrication de deux triangles équilatéraux, d’autres utilisant une forme à sept branches.

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À partir de ces trois formes et de notre palette de couleur (13 couleurs quand même), on peut commencer à créer des motifs de zelliges. Nul besoin de changer la taille de nos formes de base, une forme = une taille par contre on conserve le droit de changer les couleurs au gré de l’avancement du motif et de nos goûts. après quelque temps et essais on obtient une base pour avancer dans le recouvrement du plan (le pavage). Si ce motif n’est pas parfait puisqu’incomplet, on s’aperçoit malgré tout qu’il s’agrandit en revenant à nos formes de base : octogone et carré. L’évolution du motif pourrait à partir d’une certaine taille évoluer aussi en étoile (sceau ou sun) si on le souhaite.

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Je vous laisse continuer ce travail seul. Faites le comme vous le pouvez, dessinez vos formes à la main ou en informatique, imprimez-les ou coloriez les manuellement au crayon, à l’aquarelle ou si vous en avez la possibilité en créant des formes en impression3D. Le but est de s’amuser. Les enfants devraient adorer cela, surtout si vous pouvez leur permettre de transformer une idée en objets volumiques multicolores et qu’ils puissent ensuite photographier leur résultat, leur création. Au niveau éducatif, les notions de couleur, de formes, de géométrie, d’assemblage donnent de plus à ce travail une dimension éducative intéressante et peut-être pour les plus jeunes d’acquérir sans y penser, sans exercices casse-tête, des notions mathématiques et d’art qu’ils utiliseront plus tard sinon dans toute leur vie.

Bien sûr, comme je vous l’ai dit dans le premier article, l’art des zelliges ne se limite pas à 3 formes ni même à 10 ou à 100. Il n’y a que l’imagination qui limite ces formes, leur taille et leur couleur. Des formes de base on passe à des formes plus alambiquées pour répondre à un impératif. Le pavage du plan, s’il intéresse les mathématiciens, c’est, qu’à côté de notions définies comme les pavages périodiques ou semi-périodiques utilisant peu de formes et donc dessinant le même motif (si on y retire la possibilité de colorer les pièces), il y a ce qu’on appelle le pavage apériodique donc dessinant un motif aléatoire mais ensuite il y a la multiplicité des motifs complexes et colorés issus de l’imagination de leur créateur. Ces motifs sont aussi visibles dans la structure moléculaires de certains matériaux et intéressent depuis la deuxième moitié du XXème siècle les chercheurs pour les propriétés physiques et chimiques de ces matériaux quelquefois complètement différentes des matériaux qui pourtant les constituent. On les a appelés des quasi-cristaux. Les mathématiciens ont trouvés ces structures par le calcul avant qu’on les trouvent ou les créent dans la nature ou en laboratoire.

L’un des lieux les plus importants pour l’art de la zellige est l’Alhambra de Grenade. Cet ensemble de palais mauresques du XIIème siècle contient une grande partie des motifs de pavages périodiques. Comme dans les châteaux et cathédrales européennes, les architectes ont sublimés leur connaissances en créant des lieux magiques et intemporels qui continuent encore aujourd’hui par nous étonner par leur méthodes de construction et par les connaissances qu’il fallait maîtriser pour les construire. L’art passe par un renouvellement régulier et la mosaïque arabe a elle même été récupérée et continue d’alimenter la création artistique actuelle. Au XXème siècle, les travaux de Victor Vasarely et de M.C. Escher en sont les preuves.

Je vous mets ci-dessous mais aussi sur Facebook et Pinterest le travail effectué ces derniers jours.

Motif_zellige_1.08.1-Motif_octogonal copie Motif_zellige_1.08.2-Motif_octogonal copie

Motif octogonal : la seule différence entre ses deux motifs et la présence d’un espacement entre les formes de base qui différent entre eux. Cet écartement variable permet d’aérer un motif et de le rendre plus léger cette lisière entre les formes est aussi un motif en lui même et deviens un entrelac qu’on peut suivre à volonté. Dans l’art islamique, l’interdiction de représenter la création de Dieu (personnes, animaux et plantes et Dieu lui-même) a donc laissé libre cours aux artistes d’utiliser la calligraphie et la géométrie, l’artiste est aussi mathématicien et cela nous rappelle les travaux scientifiques de Léonard de Vinci ou les jardins de André Le Nôtre en leur temps.

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Motif carré : J’utilise le même procédé ici en augmentant progressivement l’écart entre les zelliges jusqu’à ce que la forme la plus petite ne devienne qu’un point minuscule. Le travail de l’artisan étant de gérer cette saturation suivant le lieu dans lequel est implanté le motif. Ci-dessous, le motif le plus aéré en duplication identique.

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En dernier, je vous mets deux motifs de sceau fait à partir du motif précédent. Peu de différences mais cela montre qu’entre le motif original et ces versions une pièce est modifiée trois fois pour se conformer au motif. Je vous laisse chercher cette pièce. Le reste étant identique par rapport au carré original.

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On pourrait changer le motif de ma seconde image (à droite ci-dessus) par les trois précédents motifs plus complexes (si bien sûr je les avais réalisé pour cela) et obtenir déjà une fresque assez conséquente. Les fresques faites sur des surfaces très grandes sont réalisées comme cela en pensant le motif comme de plus petits motifs et ce jusqu’à revenir aux formes de base de la technique.

J’espère vous avoir appris quelque chose par ces deux articles, j’ai essayé d’être clair et de ne pas utiliser de notions mathématiques complexes. Merci de votre lecture.

Suite de l’article ici : Initiation au pavage – partie 3